Le sport, c’est le développement de l’instinct de survie dans la vie quotidienne

Avec mon homme, comme on aime bien faire les patates devant la télé, on a pour habitude de zapper pour finir par regarder des re-re-re-diffusions d’émissions de GameOne ou Nolife à l’heure du goûter et même le soir quand on a pas envie ou pas le temps de mettre une série. En ce moment, c’est super, même pas besoin de parcourir 118 chaînes de cuit à l’huile pour trouver quelque chose de potable à la télé, France Télévision nous gratifie d’une diffusion quasi continue des JO de Londres. Et comme c’est à Londres, c’est pas à des horaires improbables genre 2h du matin.

Ce qu’il y a de bien avec les JO, c’est que c’est l’occasion de découvrir qu’il existe plus de 3 sports différents dans la vie. Il n’y a pas que le foot, le vélo et le tennis. Pourtant, les chaînes de télé semblent mener une coalition pour essayer de nous persuader du contraire. Et là, France Télévision nous révèle le pot aux roses. Il existe d’autres sports. Il y a … le foot féminin ! Toi aussi, cher lecteur, tu te demandes bien ce que ça peut être que ce sport là. Je t’assure, après vérification, il n’a pas été inventé spécialement pour les JO. Et il y a même des gens qui y jouent ! En fait, c’est très simple, c’est du foot, mais avec des filles. Je t’imagine déjà me dire « Comment, mais c’est pas possible, les seuls sports avec des filles c’est ceux où elles sont en collants ou en tutu, d’ailleurs ça ressemble pas vraiment à du sport,ça fait des simagrées, c’est des trucs de filles, quoi ! ». Et bien tu seras ravi de découvrir qu’en fait il existe plein de sports où les filles ne sont pas en collants ou en tutu. Elles portent des shorts et des tee-shirts et, chose plus surprenante encore, elle savent taper dans un ballon !

Bon, je te vois d’ici me dire « ouais mais bon, le foot féminin, ok mais ça reste du foot. Je t’avoue que la surprise a été grande mais finalement, c’est quand même le même sport, hein. On en est toujours à 3 ». Attends un peu. Parce qu’une fois qu’on a décidé de mettre un tas de joueurs sur le terrain et de les frustrer en les laissant se disputer un seul petit ballon pour 10 à 22 gaillards il y a des tas de variantes possibles. Bon, moi je suis d’accord qu’il faut apprendre la frustration aux gens mais quand on voit où en sont réduits parfois les joueurs de foot – ils font grève dans le bus parce qu’ils n’ont pas un ballon chacun – je me dis qu’on devrait leur laisser des moments où ils peuvent s’exprimer avec leur petit ballon personnel. En plus, ça ferait plus de boulot aux gardiens de but qui, parfois, ont l’air de se la couler douce. Mais revenons à nos variantes. Le foot, c’est des mecs qui se disputent un ballon pour aller le mettre dans une cage en tapant dedans avec les pieds.
– si les mecs ont le droit de prendre le ballon à la main – mais pas trop quand même – ça s’appelle du hand
– si la cage devient un tout petit panier à peine plus gros que le ballon, c’est du basket.
– si y’a ni cage ni panier mais qu’il faut aller poser le ballon derrière la ligne du fond du terrain, de préférence en se roulant par terre pour pouvoir faire après de la pub pour de la lessive, c’est du rugby.

Et on peut encore rajouter 3 autres sports, il suffit de rajouter « féminin » derrière chaque nom et pof, c’est pareil, mais avec des filles. Ca c’était pour les sports collectifs. Après, il y a les sports individuels. D’abord, il y a tous les sports où il faut aller le plus vite possible. Ne me demandez pas pourquoi. Les mecs s’épuisent volontairement pour être plus rapides que le petit copain d’à côté et tout le monde trouve ça normal. Ca vient sans doute d’un vieil instinct de survie. Si t’étais le dernier à être poursuivi par un ours, à part tenter de faire le mort pour que l’ours se désintéresse de toi, t’étais le premier à te faire manger. C’est sans doute comme ça qu’ils ont inventé la course à pied. En plus, comme les concepteurs de la course, quand ils l’ont inventée, se sont dit que ça serait quand même vraiment bizarre qu’il y ait plus de 9 mecs qui aient envie d’aller se crever le cul à courir pour rien – oui, parce que aux JO ils ont enlevé l’ours – ils n’ont fait que 9 couloirs pour les athlètes. Parce qu’ils sont obligés de courir en ligne, ils ne peuvent même pas zigzaguer pour tenter de feinter l’ours qui les poursuit. En même temps puisqu’il n’y a plus d’ours…

Toujours est-il que, très bizarrement, il y a plein de gens qui ont envie de faire ça et que du coup, il faut faire plusieurs qualifications et courir plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus que 8 mecs, pour pouvoir déterminer le champion-grand-survivant. Ce sport existe sur plusieurs distances. Pour échapper à l’ours, c’est 400m. Pour échapper au guépard, c’est 100m, parce que le guépard c’est une grosse feignasse, s’il voit qu’il arrive pas tout de suite à choper sa pitance, il repart se coucher.

Dans le même genre, pour les nations insulaires, on a développé la natation pour échapper aux requins. C’est un peu le même principe, sauf qu’il faut nager. Dans l’idée, c’est bien. Sauf que si tu demandes à un mec de courir 100 m puis de nager 100 m, tu remarqueras que la nage est beaucoup moins efficace. Alors, en mer, pour échapper au requin, je comprends bien l’intérêt de nager le plus vite possible, mais dans une piscine…Ils auraient aussi vite fait de vider la piscine, les mecs iraient plus vite et en plus ils auraient pas besoin de se mouiller. Bien sûr, comme c’était pas suffisant de nous pondre un sport inutile, ils ont fait des variantes. On peut nager sur le ventre, sur le dos… On en voit certains qui font des grands gestes et des gros ploufs, on a l’impression qu’ils essaient de vider la piscine pour pouvoir ensuite se mettre à courir et aller plus vite. Ca s’appelle le papillon. Parce qu’il est bien connu que les papillons sont de très bons nageurs…

Toujours pour prolonger notre infatigable instinct de survie, il y a la gymnastique artistique. Là, plutôt que d’essayer bêtement de se barrer en courant ou en nageant, il s’agit d’échapper à la bête en prenant de la hauteur. C’est quand même beaucoup plus malin et beaucoup moins fatiguant. On apprend à franchir des obstacles, à tenir en équilibre sur des branches et même à sauter sur la branche au cas où la bête féroce qui nous pourchassait se mettrait à nous balancer des projectiles. Le cheval d’arçon, quand à lui, permet de s’entraîner à éviter les coups de pattes intempestifs d’une bête féroce, au cas où l’on n’aurait pas pu se percher assez haut pour être tout à fait en sécurité. Le sol, par contre, j’ai plus de mal à comprendre. Peut-être une tactique pour tenter d’intimider le prédateur. Ou alors c’est pour franchir d’éventuels obstacles pendant la fuite. C’est vachement bien pensé, la gymnastique. Intégrant l’évolution de l’être humain qui implique généralement la vie en communauté, ils ont même inventé une variante à ce sport individuel : la gymnastique par équipe. Il s’agit, en gros, de montrer ses capacités de survie dans les diverses situations évoquées plus haut, mais en équipe. Mais pas question de s’entraider, on passe un par un. C’est donc un sport où l’on passe tout seul, où l’on a une note tout seul, mais on le fait en équipe. Juste, à la fin, ils additionnent les points…

Pour les plus courageux, il y a les sports où l’on décide que la meilleur défense, c’est l’attaque. Fini de tenter de fuir l’animal féroce en courant ou en grimpant à un arbre. On y va, on l’affronte. Au départ, c’était pour se protéger contre les loups. Mais comme on dit toujours que l’homme est un loup pour l’homme et que les loups, on a bien tenté de les inviter mais ils n’en ont rien à faire, des JO de Londres, on a décidé de le faire entre hommes. Ou entre femmes. On mélange pas les genres, s’il vous plaît, ça pourrait prêter à confusion. D’abord, il y a la manière frontale. Le judo, par exemple. On met les gens en pyjama pour bien se rappeler qu’on peut très bien se faire attaquer au saut du lit et qu’il faut toujours être aux aguets. Le but, c’est de faire tomber l’autre par terre en lui faisant des croches pattes on en le faisant basculer par-dessus soi. Une fois qu’il est par terre, on a tranquillement le temps de se barrer en courant. Bon, en général, eux, il restent là. C’est un peu con, je trouve. C’est d’ailleurs ce que je reproche au sport. Pas assez de pluridisciplinaire. C’est pas parce qu’on a mis l’ours au tapis avec un beau kata-guruma qu’il ne risque pas de se relever pour nous bouffer. On a tout intérêt à partir en courant, où à grimper dans un arbre. Ca gagne du temps, le judo, c’est tout.

Après, il y a la lutte gréco-romaine. Bon. Je voudrais pas dire, mais le sport là, on sent qu’il est déjà plus fait pour les problèmes inter-humains. Parce qu’une partie de ce sport consiste à essayer de retourner l’adversaire au sol et ça, avec un ours, je vois pas bien l’intérêt. Par contre, avec un mec qui t’a piqué ton sandwich, ça a tout de suite beaucoup plus de sens. Alors là, je ne sais pas bien pourquoi, il nous ont mis les types en justaucorps. Ils passent un moment debout à tenter de se faire tomber : ça reprend la logique du judo même si les lutteurs ont plus tendance à essayer de se pousser vainement sans qu’on comprenne trop où ils veulent en venir. Limite on se demande s’ils se font pas un câlin. Ensuite, ils en mettent un à 4 pattes et l’autre doit le retourner pour récupérer son sandwich. Et là, celui du dessus se met à cheval sur celui du dessous et ça se frotte, ça gigote…Quand en plus on a les commentaires du mec de France télé qui dit « allez vas-y, plus fort, plus haut », on se demande sincèrement si on n’est pas devant le film du samedi soir de canal+ … en plus, aux JO, ils ont même enlevé le sandwich.

Le seul truc, c’est qu’aux JO, il y a aussi tout un tas de sports qui ne servent à rien. Il n’y est ni question d’apprendre à gérer sa frustration ou d’apprendre à viser, ni de savoir échapper au prédateur. Ces sports là, c’est un vrai mystère. On se demande même comment on a pu les inventer…

D’abord, il y a le tennis. C’est un peu la même histoire que les mecs qui doivent se battre pour un ballon. Sauf que là, le but du jeu n’est pas de garder le ballon. Le ballon est beaucoup plus petit, du coup on appelle ça une balle et on tape dedans avec un machin qui ressemble vaguement à une poêle mais avec des fils à la place du fond. Les mecs passent leur temps à se renvoyer la balle comme une patate chaude de part et d’autre d’un filet. Des fois, il y en a un qui la rate. Alors l’autre marque un point. Mais pas toujours parce qu’en plus il faut mettre la balle entre les lignes. Il est aussi recommandé de pousser des petits cris, surtout si l’on est une femme. Mais ce n’est pas obligatoire. Bon, c’est rigolo à regarder mais l’application dans la vie quotidienne, c’est zéro. A moins que ça se soit une allégorie très détournée du lancer de crêpes à la poêle. Je ne vois que ça…

Mais il y a encore plus con. On prend les mêmes bases sauf qu’au lieu de mettre une balle, on va mettre un volant. Ca s’appelle le badminton. Mais méfie-toi, ami lecteur. Ce n’est pas parce que ça s’appelle un volant que ça vole. Bien au contraire. Le machin, à peine on a tapé dedans qu’il prend la direction du sol. Aucune originalité. Il va toujours, irréversiblement, vers le sol. Les mecs essaient bien de s’évertuer à tenter de le garder en l’air, de lui faire prendre des directions aléatoires. Mais le volant, il a décidé que non, il ne défierait pas la gravité. Parce qu’encore, au tennis, les types ont compris que la balle tombe, mais c’est pas grave, ils tapent dedans quand même. au badminton, si ça tombe, c’est foutu. Alors les types ils s’épuisent à essayer de taper super fort dans un truc qui vole pas pour tenter de faire changer d’avis ce foutu volant qui a décidé de toujours retomber. Ils ont même essayé de changer le volant. Mais c’est un club. Ils font tous pareil, les salauds. Ca serait quand même plus rigolo, si un jour un volant – tiens appelons-le Roger – décidait que, non, lui il ne retomberait pas tout de suite sur le sol, il irait d’abord faire un petit tour dans le public voir la couleur de la culotte des filles en jupe. Les deux gugusses, sur leur terrain, ils auraient l’air malins, à attendre Roger. Mais ça aurait le mérite d’être rigolo.

Après, il y a la course de vitesse en cyclisme sur piste. Alors attention, le cyclisme, je respecte. Plutôt que de se fatiguer à essayer d’échapper à l’ours à pied, l’homme a inventé une machine qui lui permet d’aller plus vite et à moindre effort. C’est génial. C’est comme l’aviron dans l’eau pour échapper aux requins. Moi je dis respect. C’est un beau sport, ça. Utile. Mais il a fallu qu’ils corrompent le truc et le rendent totalement futile. Déjà, ils ont décidé que les cyclistes iraient courir sur une piste ovale. C’est complètement con. Quand on essaie de fuir un ours, on évite de repasser plusieurs fois au même endroit. Si l’ours est pas trop bête, au bout d’un moment, il va juste s’arrêter et t’attendre sagement, et là, c’est toi qui auras l’air idiot, alors que tu avais la supériorité de la machine. Bon, ils ont enlevé l’ours, mais niveau motivation, c’est moyen.

D’ailleurs, on le voit bien que le coureur est frustré. On le met sur son vélo et là, avant le départ, y’a toujours un mec juste à côté de lui, qui lui parle et lui fait un câlin. Et le cycliste il dit « mais je veux pas y aller, c’est nase, je veux une route, moi, sentir les dangers de la nature ». Et l’autre de lui faire un câlin « mais non Gégé, t’inquiète, c’est parce que l’assurance elle a demandé, parce que si tu te faisais dévorer par un ours, ça ferait quand même un peu désordre, après faudrait interdire les jeux aux moins de 18 ans à la télé ». Puis comme Gégé ne veut toujours pas partir, son copain finit par le pousser et là, s’il ne veut pas se casser la figure, il n’a pas d’autre choix que de pédaler. Dans le même temps, il y a le concurrent de Gégé – appelons-le Günter, les JO c’est international – un peu dans le même état d’esprit, qui est parti juste derrière. Donc là, Günter va jouer le rôle de l’ours qui pourchasse Gégé. Sauf qu’ils ne sont vraiment pas motivés par la piste. Ils ont bien compris que c’était complètement con de tourner en rond. alors ils y vont mollo, Gégé regarde de temps en temps derrière lui pour voir ce que fait Günter. Il se demande même s’ils devraient pas tout plaquer, là et aller se boire une bière, tiens. Puis, d’un coup, Günter se dit que, nan, c’est trop con, allez, hop, j’y vais je suis quand même payé pour ça. Il accélère. Alors Gégé accélère aussi. Celui qui gagne, c’est celui qui finit devant. Mais inventer un sport qui rend les coureurs dépressifs alors qu’on pourrait les mettre sur une belle route avec tous les copains, c’est quand même dommage…

Il y a aussi l’équitation. Encore une fois, on pourrait croire que ça rentre dans la catégorie « instinct de survie ». Les mecs, ils ont pas été capables d’inventer le vélo,mais ils ont trouvé le moyen de domestiquer le cheval et de grimper dessus pour aller plus vite. En plus, le bon point, c’est que si tu te fais rattraper par l’ours, tu peux toujours espérer qu’il s’en prenne au cheval et que tu aies le temps de filer discrétos. Ouais. Mais non. Ca serait vrai si c’était de la course de vitesse. Bon ils tiennent compte de la vitesse. Mais ils mettent les pauvres sportifs sur un terrain et lui font faire des boucles et des boucles d’un parcours improbable truffé d’obstacles. On ne leur a jamais dit que le plus court chemin d’un point A à un point B, c’est la ligne droite ? Oui, bon, pas pour les shadoks. C’est un sport shadok, alors ? Non ? bon… Donc les mecs s’échinent à suivre un parcours tarabiscoté et à faire le meilleur temps possible alors que moi, si dans le même temps je pars en courant du point A au point B et que je vais tout droit, je suis sûre que j’arrive avant. Il est vrai que dans les documentaires à la télé, on voit que les animaux prennent parfois des virages pour perturber le poursuivant. Mais pas à ce point, pas autant. Là, c’est juste ridicule. Tout ce qu’ils vont parvenir à faire, c’est avoir le tournis !

En parlant de tournis, la natation synchronisée, c’est pas mal. Ce sport là, il a dû être créé par une dresseuse d’otaries dont toutes les otaries faisaient grève, et qui devait absolument présenter un spectacle sinon elle était virée. Elle a appelé une copine avec elle, pour pas être toute seule comme une con dans une grande piscine, et elle a fait un spectacle. En version JO, ça donne un truc assez bizarre. Deux jeune femmes en maillot de bain à paillettes, surmaquillées – parce qu’il est bien connu qu’on se maquille toujours avant d’aller à la piscine – et avec les cheveux tirés à 4 épingles arrivent sur ce qu’ils appellent la plage. Nous on appellera ça le bord de la piscine, parce qu’il n’y a même pas de sable alors pour une plage, c’est un peu pourri. Les deux filles marchent hyper synchro. Elles avancent les bras et les jambes en même temps, encore plus précises que les meilleurs alignements de militaires surentraînés. Elles sourient, prennent quelques poses bizarres puis plongent dans l’eau. Et là, le but du jeu, c’est de faire des gesticulations inutiles mais bien en même temps. Inutiles parce qu’elles font principalement du sur place. Bon elles plongent, ressortent, agitent les gambettes, mais ça ne nous avance pas à grand chose. Niveau survie, c’est zéro. A moins qu’elles espèrent, avec leurs gesticulations, déstabiliser le requin affamé qui, hésitant entre deux proies parfaitement identiques qui bougent de manière irrationnelle, préférera aller chasser un autre truc « parce que celui-là, vraiment, il bouge bizarre, à mon avis il est malade ». Et je ne te parle même pas de l’haltérophilie, du lancer de marteau, du triple saut…

août 2012